mardi 16 décembre 2014

Crève

Crève

Nul doute que nos espaces intimes de liberté aient toujours été la cible privilégiée de l’avidité hégémonique et compulsive des marchands de tout poil. Leurs propagandes suivent toutes à peu près la même logique implacable d’appropriation : associer leur produit à une action, un sentiment ou une idée qui nous sont chers dans le but « ultime » de nous faire croire que le vide ainsi crée sera comblé par le passage en caisse.

lundi 3 novembre 2014

Le Maître du temps



Le Maître du temps



Le Maître du temps dit quand. Quand attendre avant de commencer. Quand commencer. Quand faire. Quand attendre qu’il fasse. Quand refaire ce qu’il a défait. Quand défaire ce qu’il a refait. Quand attendre pour récolter, gravé sur les secteurs métallisés, le fruit précieux de notre travail.
Son rythme n’était pas le nôtre, mais peu à peu, il nous a happés dans ses cycles. Dans notre tragi-comique quête de gain – gain de temps, gain d’argent, gain de pouvoir – nous l’avons sacré Dieu. Un dieu, jaloux, exclusif et aimant, comme il sied à tout dieu qui se respecte.



Le Maître du temps aime l’ordre. Non pas l’ordre des choses, mais l’ordre dans lequel faire les choses : l’une après l’autre. Il a découpé la vie en une interminable suite séquentielle de tâches basiques qui, comme nous, attendent leur heure. Les créatures inférieures marchent en chantant, regardent, écoutent, sentent, goûtent, touchent et font mille choses en même temps. Mais pas le Maître. Lui, Il joue une séquence Midi, puis calcule un filtre, puis recalcule mille autre choses extraordinaire, mais toujours l’une après l’autre. Béats d’admiration, nous Le regardons à l’œuvre.


vendredi 12 septembre 2014

L'e-mail aux Ephésiens

L'e-mail aux Ephésiens




Ephèse. Dans l'actuelle Turquie. Fief légendaire des Amazones. Trésorerie générale de l'Asie. Première des douze cités de la confédération ionienne. Ephèse grecque, patrie d'Artemis, drainant à elle foule de pèlerins et philosophes. Ephèse romaine, cosmopolite où, en 53, l'apôtre Paul s'installa pour prêcher et fonder l'une des sept églises de l'Apocalypse. Ephèse destinataire de l'épître (ou lettre) du même saint Paul aux Ephésiens. Celle qui pendant près de quinze siècles fut source d'orgueil et de convoitise n'est aujourd'hui plus que ruines. De la cité haute, je contemple ses vestiges de marbre blanc scintillant sous le soleil d'avril.
Franchement débarqué de Paris, j'ai encore le bourdonnement des voitures et le souffle des ventilateurs d'ordinateurs dans la tête. Mais le vent printanier les entraîne irrésistiblement au loin, dans des bouffées de senteurs de fleurs, laissant sourdre du sol le chuchotement des pierres et des esprits anciens. Ephèse, comme tous les vestiges antiques, s'empare de l'âme du voyageur, le plongeant dans un rêve éveillé pour lui dire la grandeur et la vanité des choses et des êtres.

mardi 22 juillet 2014

Le rythme universel

Le rythme universel



Mon cœur bat. Une pulsation primordiale venue du fond des âges émerge crescendo de l'océan de mes pensées. Sa vibration s'enfle et emplit peu à peu l’espace de ma conscience jusqu'à entrer en résonance avec tout mon être. On dirait le son du Daiko qui scande un ostinato à un temps. Ou une valse à trois temps. Je ne sais plus.
A trop écouter, j'ai oublié de respirer. Le tempo s'accélère imperceptiblement, par manque d'oxygène. Le rythme change. D'autant que je commence à entendre en superposition le contrepoint du sang qui bat dans mes tempes ainsi que mille échos de la vie qui circule dans mon corps. Une bouffée d'air. Respiration abdominale. Le solo devient duo. La riche polyrythmie de cette composition spontanée et organique s'enrichit maintenant de la modulation cyclique de l'air pulsé par mes poumons.
En m'obligeant à respirer régulièrement, j'ai déplacé ma concentration sur ma respiration que j'entends au premier plan, sur fond de Daiko. J'inspire et la vie s'engouffre en moi. Au sommet de l'inspiration, je contemple l'infini, et le cycle recommence. Le duo est devenue symphonie. Des milliards de milliards d'interprètes en jouent avec moi la partition, subtilement modulée par l'alternance du jour et de la nuit, par les saisons, la danse de la lune et du soleil, l'orbite des planètes, le chant des étoiles, le fracas des galaxies. Une clameur sans début ni fin. Le cycle ultime de tous les cycles. Souple. Inextinguible. Le rythme universel.

mardi 17 juin 2014

Souffle

Souffle



En sortant du concert de chant diphonique(1) « khöömii » du chanteur mongol Bayarbaatar Davaasuren, je sentais bien que je n'étais plus le même. Tout en marchant sous la voûte étoilée, un sentiment de plénitude m'envahissait ; cette jubilation que l'on éprouve enfant au contact des choses simples et essentielles : l'odeur de l'herbe mouillée, le chant des insectes nocturnes, le frisson né de la caresse du vent sur la peau. La joie dans la perfection d'être. Ici et maintenant. Je l'avais pourtant lu sur le programme, mais je n'y avais pas pris garde, pensant alors qu'il ne s'agissait que de mots : « Pour les Mongols, le khöömii est un chant sacré servant à rendre hommage à la splendeur qui les entoure. » Maintenant je comprends.
Dès que la première note, sortie de sa bouche, a rempli l'espace de la salle, le public, sous le charme, s'est envolé pour un voyage d'une heure et demie sans escale. Un petit Mongol sans âge, tout juste débarquée de sa steppe natale, seul sur scène, s'accompagnant simplement d'une vieille à deux cordes, connaissait le chant de la terre. Et nous, occidentaux nantis et technologiques, nous recevions bouche bée cette résonance universelle. Comme la ville asphyxiée sous un soleil de plomb attend la mousson, nous espérions, sans le savoir, ces gouttes sonores bienfaisantes.

Sevran 2014


mercredi 21 mai 2014

Wild Wide Web

Wild Wide Web


Nous vivons en harmonie dans un monde sauvage, sans autre loi que la Netiquette. Création, partage du savoir et échanges rythmaient nos jours et nos nuits. L'éclair dompté avait trouvé sa raison d'être. Des messages de paix filaient tout autour de la Terre, vifs comme la lumière, porteur d'espoir et de guérison. Mais aujourd'hui, voici qu'ils recommencent. Ils n'ont toujours pas compris ! Ceux qui nous traitaient hier de sauvages et calomniaient notre pays et nos coutumes sont les mêmes qui, aujourd'hui, nous copient, veulent nous chasser ou nous racheter. Les pères de leur pères bâtissaient leur fortune sur les cadavres de nos ancêtres et ceux des colons. Épidémies, eau de feu, fusils, poker, prostituées, usure pour les nouveaux immigrants, ils ne reculaient devant aucun stratagème. Comme disait un de leur adages : « Un bon indien est un Indien mort. » Après avoir, pendant des siècles, notre mère la Terre et asservi ses enfants, ils s'en prennent aujourd'hui aux territoires cybers. Ils arrivent sans nombre, le cœur empli des mêmes désirs avides qu'hier. La fièvre de l'or les brûles et l’appât du pouvoir les tourmente. Et ils appellent ça l'esprit pionnier !
Pour mieux se faire accepter par nos tribus et amadouer les nouveaux venus, ils utilisent nos codes, nos couleurs, nos mots, nos paysages familier. Ils s'achètent une noblesse avec des www en titre et des .com en particule. Dans leur villes de béton, les images publicitaire changent insidieusement. Ils placardent les murs d'images d'ordinateur, de signes pixelisés, de capture d'écran et d'icônes informatiques. Une ruse succède à une autre : ils remplace la trop parfaite plastique des femmes et des hommes aux corps nus par le visage blafard et familier d’internautes moyens. Le capot des voitures par celui es ordinateurs. Les paysages de mers chaudes et de palmiers par un coucher de soleil rouge façon Far West, sur lequel se découpent les montagnes rocheuses. Même leur Église cathodique se pare des attributs virtuels. Ils achètent pour quelques dollars nos noms de domaines pour nous les revendre un peu plus tard mille fois leur prix. Ils nous espionnent à notre insu et négocient à prix d'or leurs informations avec d'autres chiens de leur espèce. Sans nous avertir. Sans rien nous offrir en échange.
Ils profèrent des mots dont ils ignorent le sens : liberté, partage, réseau, art, sens, création, nouveau monde. Ils ont la langue fourchue. Ils nous disent : « Think different », mais eux pensent toujours pareil. Prendre. Prendre tout. A tout prix. Ils nous disent : « Bienvenue dans la vie.com. » Ils pensent plutôt : « Bienvenue dans ma boutique.com. » Car la vie n'a rien à voir avec leur petit commerce. Ils croient que la Terre leur appartient alors que ce sont eux qui appartiennent à la Terre. Ils débarquent et demandent : « A qui appartient cette Terre ? » Que répondre ? La Terre n'a pas de propriétaire, un nouveau-né sait cela. « Nous allons vous faire aimer l'an 2000 »: est-ce une menace ou un ordre déguisé ? A moins que ce ne soit vanité ou prétention ! En ont-ils seulement les moyens ? Quelles verroteries pourraient-ils agiter pour faire oublier le prix qu'ils nous font payer pour passer par leur réseaux ? Ils se frottent les mains, car le voyageur qui cherche son chemin ira au saloon, au drugstore ou au tripot de celui qui aura payé le prix fort. Ils sont cyniques. Ce qu'ils donnent d'une main, ils le reprennent d'une autre. Ils disent : « Devenez riches, tentez l'aventure, conquérez le nouveau monde ! » Mais dans la ruée vers l'or, les vendeurs de pelles gagnent toujours plus que ceux qui creusent, et les gagnants, ceux qui s'enrichissent vraiment, ce sont encore eux.
Leur cohortes de shérifs suspicieux nous épient et nous traquent dans l'ombre. Leur grand sorcier, le NSA (National Security Agency), a accouché d'un monstre. L'esprit mauvais d'Echelon plane sur la planète. Jour et nuit. Echelon ne connaît que les morts-clés qu'il veut bien entendre. Chaque message utilisant un de ces mots-clés est aussitôt intercepté, puis lu ou écouté. Alors, donnons-lui ces mots. Que tout les humains lui en donnent jusqu'à ce qu'il en crève ! Akawa.com qui est sage, réclame au président que justice soit faite ! Ils nouent des alliances monstrueuses. Bientôt leur sectes ne feront plus qu'un. De complots en complots, sont-ils assez fous pour imaginer un jour pouvoir prendre la place du Grand Esprit ?
Soyons donc vigilants : la toile pourrait s'avérer être celle de l'araignée. Elle attend. Elle sait que les mouches sont innombrables, comme les herbes sur la prairie où couraient les bisons.
Mais nous ne sommes pas des mouches.
Nous sommes des humains. Les derniers.

vendredi 31 janvier 2014

Les Détours de Babel


Réalisation avec les écoliers de l’agglomération de Grenoble, le CHU, le muséum d'histoire naturelle, la MJC et la Metro  d’une «forêt de fleurs géantes» confectionnée à partir de milliers de bouteilles multicolores recyclées en plastique transparent.
 

Un projet artistique & participatif de grande envergure de janvier à avril 2014 

Le Centre International des Musiques Nomades (CIMN), dédié à la création musicale, qui organise chaque année le festival Détours de Babel, a commandé à Pierre Estève un projet de grande ampleur autour de Flowers 2.0 pour sa 4e édition, qui aura lieu du 26 mars au 12 avril 2014, sous la thématique "Musique & Nature".
Le projet se traduira par la réalisation et l’installation dans l’espace public de centaines de fleurs fabriquées collectivement sous la direction de Pierre Estève à partir de milliers de bouteilles multicolores en plastique recyclées, à l’échelle de l’agglomération. Cette installation sera associée à une diffusion sonore  composée par Pierre Estève pour l’occasion.

Ce projet implique la participation des habitants de l’agglomération dans le processus de création. Il contribue aussi à une prise de conscience collective des enjeux liés au recyclage des déchets, au développement durable et à l’écocitoyenneté. Il sera le grand événement fédérateur et médiatique du Festival.

W HOTEL - Opéra paris


Pierre Estève s'associe aux designers issus du programme "Talents à la carte" de Maison & Objet pour proposer au sein du Sparkling Garden du W Paris Opéra,  où Flowers 2.0, lumineuse et joyeuse, donne une dimension éco-responsable. [mai 2013]

Rendez-vous au jardin - Sevran

C’est sous un magnifique soleil, que les sevranais ont pu découvrir le chant des pierres sonores que Pierre Estève a installé sur la friche de Sevran, un site extraordinaire où Gongs et Lithophones ont pris place. [juin 2013]

Flowers 2.0 à La Défense



Durant la semaine du développement durable , Les Flowers 2.0 étaient exposées
 sur le parvis de La Défense. [avril 2013]

Exposition Jardin de curiosités Taffin

 
Après Lausanne et avant la Défense, l'installation de Pierre Estève, Flowers 2.0 prend ses quartiers d'hiver à Montmorency dans le Val d'Oise jusqu'au 20 mars 2013. Plantées au coeur du jardin exotique de la Jardinerie de Curiosités Taffin, des fleurs géantes, multicolores, et lumineuses se déploient en une nature mutante et fantastique. Sensible au moindre souffle de vent, ce champs féerique s'anime le soir venu d'un autre mouvement créé par les mouvements imperceptibles de la lumière. Glissement progressifs d'une teinte à l'autre. Jeux d'apparitions et disparitions. Une nature rêvée, translucide, fascinante de brillance. Créée à partir de milliers de bouteilles plastiques recyclées, Flowers 2.0 fait référence à une nature hybride et mutante, fruit du croisement de la société de communication, de l' internet, et de la revalorisation par le recyclage de ce que nous considérions jusqu'alors comme déchet. [mars 2013]

Festival des Lumières de Lausanne, Suisse



Après leur floraison dans le Désert de Saragosse, en Espagne, les Flowers 2.0 viennent confronter leurs natures hybrides au paysage urbain de la ville de Lausanne. Ces installations illuminent les promenades des passants tant par leur esthétique que par l'éthique que traduit ici l'artiste : "à l'heure où tout objet obsolète disparait pour faire place à du plus beau, du plus performant, du plus rentable, nous avons le choix de réutiliser, recycler ce que nous avons créé et le magnifier". Composée de centaines de fleurs créées à partir de bouteilles multicolores en plastique transparent recyclées, Flowers 2.0 a été conçue pour fonctionner de manière optimale aussi bien de jour que de nuit. [décembre 2012]

Festival Nowhere, Désert de Saragosse



Les Flowers 2.0 de Pierre Estève ont grandi dans le désert de Saragosse en Espagne durant le Festival du Nowhere, ce début juillet 2012.  Dans un mini Colorado, soleil au zenith , ce champs de fleurs oscillant au rythme d'une douce brise, a poussé dans un sol craquelé par la sécheresse et où  leurs pétales multicolores s'y reflètent. A la nuit tombée, telles des lucioles elles s'illuminent et donnent  l'impression d'être suspendues dans les airs. [juillet 2012]