Le rythme universel
Mon cœur bat. Une pulsation primordiale venue du fond des âges émerge crescendo de l'océan de mes pensées. Sa vibration s'enfle et emplit peu à peu l’espace de ma conscience jusqu'à entrer en résonance avec tout mon être. On dirait le son du Daiko qui scande un ostinato à un temps. Ou une valse à trois temps. Je ne sais plus.
A trop écouter, j'ai oublié de
respirer. Le tempo s'accélère imperceptiblement, par manque
d'oxygène. Le rythme change. D'autant que je commence à entendre en
superposition le contrepoint du sang qui bat dans mes tempes ainsi
que mille échos de la vie qui circule dans mon corps. Une bouffée
d'air. Respiration abdominale. Le solo devient duo. La riche
polyrythmie de cette composition spontanée et organique s'enrichit
maintenant de la modulation cyclique de l'air pulsé par mes poumons.
En m'obligeant à respirer
régulièrement, j'ai déplacé ma concentration sur ma respiration
que j'entends au premier plan, sur fond de Daiko. J'inspire et la vie
s'engouffre en moi. Au sommet de l'inspiration, je contemple
l'infini, et le cycle recommence. Le duo est devenue symphonie. Des
milliards de milliards d'interprètes en jouent avec moi la
partition, subtilement modulée par l'alternance du jour et de la
nuit, par les saisons, la danse de la lune et du soleil, l'orbite des
planètes, le chant des étoiles, le fracas des galaxies. Une clameur
sans début ni fin. Le cycle ultime de tous les cycles. Souple.
Inextinguible. Le rythme universel.